mercredi 9 août 2017

Une information délicate à traiter : la mort du père de la reine Máxima [Actu]

Le chagrin de la reine est traité en photo mais dans la colonne de droite
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Jorge Zorreguieta vient de mourir, après une vingtaine d'années de lutte contre une leucémie. Il avait 89 ans et un passé qui passe peu. Il avait été ministre de l'Agriculture du gouvernement putschiste issu du coup d'Etat du 24 mars 1976 (Videla et compagnie). Puissant propriétaire agricole, il avait présidé plusieurs fédérations agraires, dont celle des producteurs sucriers et la plus influente de toutes les instances patronales argentines, la Sociedad Rural, au titre de laquelle il avait été nommé au ministère de l'Agriculture.

Lors que le prince héritier des Pays-Bas avait porté son choix sur Máxima Zorreguieta, jeune Argentine d'excellente famille (du point de vue mondain), il avait soulevé une vague de désapprobation dans l'opinion publique et le personnel politique du royaume (et d'une bonne partie de la Communauté Européenne). Zorreguieta avait été prié de rester chez lui, pour assister à la cérémonie à la télévision et depuis, Máxima, y compris et surtout depuis que son mari est devenu chef d'Etat, se montre d'une grande discrétion dans ses relations avec sa famille. Hier, les journaux se faisaient l'écho de sa visite à la clinique de Recoleta, où son père avait été admis, pour dire qu'elle avait ensuite repris l'avion pour l'Europe tandis que l'équipe médicale émettait un communiqué lénifiant rendant vraisemblable ce retour vers les Pays-Bas. Aujourd'hui, les médias nous apprennent qu'elle était en fait arrivée samedi en urgence et qu'elle est restée confidentiellement auprès de son père, qu'elle a veillé jusqu'à son dernier souffle. A quelques jours d'un scrutin national et provincial, les PASO de dimanche, la primaire argentine, en fait le premier tour d'un système qui en compte maintenant trois (PASO, 1er et 2nd tours, en octobre), l'information est difficile à traiter... D'autant que le Président Mauricio Macri n'a jamais caché qu'il appréciait la reine et a veillé à se montrer à ses côtés à chaque fois que cela a été possible, tant en Europe qu'en Amérique.

La Nación, qui ne recule pas devant un titre très provocateur,
traite l'information en manchette (en haut, à gauche)
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La reine assistera sans doute aux obsèques aujourd'hui ou demain, peut-être avec ses enfants, encore que cela n'ait rien de bien certain, sans doute aussi sans son mari et il y a fort à parier qu'elle devra regagner rapidement Amsterdam ou La Haye.

Clarín a sorti de ses archives cette photo très polémique où l'on voit côte à côte
Zorreguieta, la Reine Beatrix (ou la princesse Beatrix, si ce cliché date d'après son abdication) et Máxima (en gris)

Página/12 se contente d'un simple entrefilet où la rédaction ne résiste pas à la tentative de faire référence à la plainte portée contre l'ancien ministre pour la disparition d'une seule personne (ce qui est peu pour les dictateurs de cette période) (1). La plainte n'a pas donné lieu à une inculpation, encore moins à un procès ou à une condamnation. Par conséquent, l'homme est présumé innocent et il est important, en démocratie, de le relever.
Très proche des milieux patronaux et notamment des décideurs agraires, La Nación parle d'un dirigeant qui ne ménagea pas ses efforts pour développer l'économie argentine dans le secteur primaire. Les deux autres quotidiens nationaux privilégient l'aspect monarchique, ce qui est bigrement exotique pour les Argentins.

Pour en savoir plus :
lire l'entrefilet de Página/12

Ajout du 11 août 2017 :
Les choses se sont bien apaisées aux Pays-Bas. En effet, le roi Willem-Alexander et les trois princesses ont fait le voyage pour assister aux obsèques de leur beau-père et grand-père, à Buenos Aires. L'ambassadeur néerlandais accompagnait lui aussi la famille royale, ce que La Nación ne manque pas de souligner en image. Lire à ce sujet l'article de La Nación écrit à partir de la dépêche de l'agence Télam et accompagné de photos incroyables, où l'on voit un membre de la famille marcher dans le cortège tout en devisant gaiement au portable ! Le palais royal a émis un court communiqué à ce sujet (en néerlandais).



(1) Il se trouve que depuis une semaine, on parle beaucoup de la disparition mystérieuse, visiblement violente, d'un militant de gauche. Cela fait remonter à la surface de sinistres souvenirs à un moment où l'opposition n'hésite pas à assimiler l'actuel gouvernement à celui de la Junte militaire. L'enquête montrerait qu'un certain nombre d'indices désigneraient la gendarmerie, un corps militaire de forces de l'ordre et de garde-frontières qui jouit pourtant d'une image de marque meilleure que la police et l'armée par rapport aux crimes de la dictature dans lesquels elle est fort peu impliquée. Le tout dans le contexte régional où le Brésil est en train de sombrer dans un régime illégitime, ultra-corrompu et peu démocratique de droite et le Venezuela s'enfonce dans un régime de gauche tout aussi peu recommandable.